mardi 15 juin 2010, par Fred
Riche actualité pour le VCMP. Au tour de Sylvain Ollier de nous narrer sa première expérience sur un 300 km, avec un départ à 20 heures.
En attendant Bordeaux-Paris, l’Etape du Tour, les 24 heures du Mans à vélo...le club est présent partout !
L’appel du 300 : mon premier 300, ma première rando de nuit !
Arrivé sur lieu de départ de Noisiel (77) dès 19h00 pour l’inscription et la préparation de mon équipement, un départ sera donné toutes les 5 minutes dès 20h00 par groupe d’une douzaine de cyclos. Sur les 45 inscrits, un quart a vraiment le profil randonneur. C’est-à-dire équipé comme il se doit pour les longues distances : sacoches, éclairage puissant, position et assise adaptées, etc. Les autres, dont je fais partie, se présentent avec des vélos de courses et un sac à dos. Typiquement non adaptés, puisque la position dite couchée joue sur les lombaires et le poids du sac appuie sur les fessiers.
Sous un ciel menaçant, je m’élance avec le groupe du second départ, à 20h05, en direction de cette nuit inconnue. Le parcours nous fera passer par Annet-sur-Marne (77), Messy (77), Crépy-en-valois (60), Pierrefonds (60), Coucy-le-Château (02), Saint-Gobain (02), Fismes (51), Villers-Cotterets (02), Betz (60), Barcy (77), Messy (77), Thorigny (77) puis Torcy (77).
Ce parcours s’avérera fort sélectif puisqu’il y aura 20% de hors délais et d’abandons. Ce n’est pas tant la distance ou la nuit qui furent juges de paix, mais le dénivelé. Pour vous donner une idée : 100 km : > 900 m. 200 km : > 2.100 m. 320 km : > 2.950 m. Deux habitués des randonnées organisées par l’ACP - Audax Club Parisien - m’informent que ce dernier réalise des parcours où la règle 100km pour 1000m est de mise. J’avoue que si j’avais pris connaissance de cette particularité, jamais je ne me serai lancé dans mon premier 300km - et de nuit ! - avec un tel dénivelé. Cela n’a fait qu’ajouter à la difficulté.
La nuit commencera à poindre dès 22h30. Je suis excité par cette fin de jour qui annonce mon entrée dans cette imminente découverte d’un monde obscur. Drôle de sensation. Je me rends vite compte que cette obscurité me recroqueville sur mon vélo, comme si pour me concentrer sur la route il me fallait adopter la position de l’œuf. Je décide de me repositionner de façon plus ouverte, en me tenant droit sur mon cycle. Autre nouvelle sensation perturbante : ce ballet de faisceaux lumineux que projettent sur la route les éclairages de nos vélos. Pendant un instant ces halos de lumière qui dansent dans le noir me donnent le tournis. D’habitude le paysage me sert de repère et ne fait que défiler de façon linéaire sur les côtés. Mais dans la nuit, mon repère devient mouvant, dansant, virevoltant : ce sont ces lumières folles qui vont me servir de guide à partir de maintenant. Il m’a bien fallu un ¼ d’heure pour retrouver une certaine stabilité en m’habituant à ce nouvel environnement.
Question éclairage, il y a les experts et les petits joueurs. Les vrais randonneurs sont équipés de véritables phares ! Je me rends vite compte que pour rouler de nuit il ne faut pas lésiner sur le matériel. Cela paraît évident, mais la plupart des lampes vendues dans le commerce ne sont pas du tout adaptées. Pour m’être retrouvé seul dans une descente, je peux dire que j’étais inquiet et incapable d’anticiper le moindre virage ! Très dangereux.
La nuit fut particulièrement fraiche (7 à 9°C) et tout le monde, y compris les randonneurs, eu froid. Chaque arrêt fut un supplice, chaque départ une torture. Il nous fallait 2 à 3 kms pour ne plus greloter. Heureusement que je pris ma veste. Finalement, j’ai particulièrement aimé rouler de nuit. C’est à faire, à découvrir. Pas un bruit. Une route qui ne se devine que sous les feux de nos lampes. Un paysage de formes sombres et immobiles. Des villages endormis traversés sous l’éclairage urbain. C’est une ambiance plutôt sympa.
Premier contrôle et ravitaillement dans la ville de Saint-Gobain. Km 135. Il est 2h30 du matin. Je ne repars pas avec les quatre membres de mon groupe initial car je sens qu’ils roulent un poil trop fort (27-30 km/h). Après ¼ d’heure d’arrêt, je me lance à la poursuite d’un autre groupe, lui aussi composé de quatre éléments, qui roulera entre 20 et 25 à l’heure. Parfait pour moi. Même si l’on se paumera et réalisera en plus une boucle d’une dizaine de kilomètres, l’ambiance est conviviale et solidaire. C’est précieux en pleine nuit !
Au petit matin, la fatigue ne se manifesta toujours pas. Pourtant, c’est ce que j’appréhendais le plus. Je n’ai jamais était un nuitard. Si j’ai fait une nuit blanche dans ma vie, ce fut bien le maximum ! Alors, apercevoir l’aube pointer sur les coups de 5h00 du matin et entendre le chant des oiseaux réveillant la campagne, ce fut un vrai régal ! Un moment, je me retourne vers l’un de mes compagnons de route et lui fait remarquer qu’entre le moment où nous avons vu le soleil disparaître et maintenant, il a eu le temps de faire le tour de la Terre alors que nous nous n’avons pas été fichus de faire le tour de notre rando ! Un point qui m’interpella : l’absence de faim pendant la nuit. Renaud m’en avait parlé suite à son 400km de Longjumeau. C’est surprenant car on roule sept heures durant sans s’alimenter vraiment, car rien ne passe. Je savais que l’organisme était en sommeil, mais quant même. Par contre, qu’est-ce que j’ai pu boire pour éviter toute fatigue.
À une douzaine de kilomètres de notre 2nd contrôle, Fismes, une bosse de 2 kms, variant entre 8 et 9%, me fait ressentir un bon gros coup de fatigue. Au sommet, on s’arrête pour attendre un retardataire. Là je crains de devoir m’allonger pour roupiller un coup. Et puis non. Je reprends mon courage en enfourchant mon cycle et file vers ce km 185, lieu de chasse à la boîte aux lettres, pour y poster la carte qui fera office de notre preuve de passage. En repartant, vers 6h00, rebelote avec une bosse de 2,5 km et un passage à 10% pendant 200-300 mètres. Par moments, je me sens partir sous le poids de la fatigue. Je pédale en fermant les yeux. L’un des randonneurs (3 ou 4 Paris-Brest au compteur) m’explique que dès qu’il sent poindre un vrai coup de pompe, il s’arrête dormir ½ heure. Pas plus. Je n’aurai connu cette sensation qu’entre 10 et 20 minutes sur l’ensemble du parcours. Mais c’est dangereux. Oui, il faut s’arrêter avant de tituber sur son vélo !
Contrôle surprise au kilomètre 210. Il est 7h20. On nous accueille avec le Champagne. Je reste au café. Une demi-heure d’arrêt à plaisanter sur notre état de fatigue avancé et à nos douloureux fessiers ! Arrive un autre groupe au sein duquel je reconnais le président de l’UAF - Union des Audax Français - confrère de l’ACP. Mon premier 200km je le fis sur l’un de ses Audax. Il nous accompagnera jusqu’à la fin de notre parcours. Le temps est magnifique, la campagne agréable, mais l’air toujours assez frais (10°C).
Dernier contrôle dans la patrie de la famille Dumas - Alexandre père & fils - Villers-Cotterêts, km 235. Comme il est déjà 9h00 du matin, pas besoin de poster notre carte. On la fera tamponner dans un café en dégustant croissant, pain au chocolat et autre viennoiserie, le tout arrosé d’un soleil resplendissant, sous le regard de la statue de l’auteur des Trois Mousquetaires. Une bonne heure d’arrêt bien mérité.
Les 80 kms nous séparant de l’arrivée seront toujours aussi vallonnés et parcourus sous une moiteur étouffante. Le temps sent l’orage. On l’évitera. Les 10 derniers kilomètres seront les plus horribles : en zone urbaine. Pointe une longue montée avant Torcy : 1 km en ligne droite à 4-5%, parsemée de feux. La fin sera pénible. Marre des voitures, marre des feux tricolores, marre des faux plats… On termine à 15 à l’heure. Le gong sonnera à 13h30. Le compteur affichera 320 kms, dont 10 dus à notre erreur de parcours. J’aurai mis 17h30 pour rallier Noisiel depuis… Noisiel ! Rapide, non ?!? En retranchant les arrêts, à peu prêt égaux à trois bonnes heures, mon fessier aura passé 14h30 sur la selle, pour une vitesse stratosphérique de 22 km/h !
In fine, après une coupure de deux semaines sans avoir roulé (on ne comptera pas les 25 kilomètres parcourus avec le G1 sous un fort orage le dimanche matin du 6 juin), ce 300km était un peu au-dessus de mes moyens physiques. Cependant, au regard de son dénivelé, ce parcours est idéal en vue d’une préparation à un P-B-P. De plus, comme il est toujours difficile de constituer des groupes d’un même club, on peut venir seul : vous intégrez très vite un groupe sympa et faite connaissance en peu de temps. J’ai toujours était ravi par les rencontres effectuées, que ce soit sur un Audax UAF ou ACP.
Point importantissime : sur un tel parcours, il faut absolument rouler à son rythme ! Je n’aurai jamais pu suivre les gars du G2 qui auraient envoyé dans les bosses (N’est-ce pas Renaud ?) et relancés à bloc une fois au sommet (n’est-ce pas Sylvain K. ?). Sur ce parcours, jamais je n’ai été dans la rouge ni HS. Seules la fatigue due à l’absence totale de sommeil et les douleurs violentes ressenties aux genoux (sans parler des fesses, mais là tout le monde couinait), m’ont empêché d’être plus à l’aise. Pour repère, les premiers arrivés ont réalisé un joli 26 de moyenne en ne s’arrêtant en tout et pour tout qu’une seule heure !...
J’invite les membres du VCMP en quête d’aventure à tenter ce BRM 300 qui vous offrira un triptyque sympa : distance abordable, expérience de la nuit, dénivelé sérieux.